Retour à Muganza - Récit d'un avant-génocide

Retour a muganza

Auteur : Marie Niyonteze

Edition : Editions Mode Est-Ouest (MEO)

Collection : -

Parution : 02/05/2011

ISBN-13 : 978-2930333403

Pages : 96

 

Résumé : Un témoignage de plus sur le génocide rwandais ? N'en avons-nous pas pléthore ? Que peut-il apporter que nous ne croyions savoir ?
Certes, comme pour la Shoah, comme pour le génocide arménien, il est essentiel d'entretenir la flamme du souvenir dans notre monde où la ronde infernale des atrocités les chasse aussitôt des mémoires. Mais surtout, le récit de Marie Niyonteze nous prouve que ce génocide était prévisible, qu'une répétition générale avait eu lieu quatre ans auparavant, lors de la première incursion du FPR.
Cadre dans une entreprise belgo-rwandaise, Marie Niyonteze a été arrêtée en 1990 pour le simple motif d'être tutsie. Elle ne doit la vie, et celle, provisoire hélas, de son bébé né en prison, qu'à un enfilement de chances. Chance que n'aura pas un de ses frères. Et quatre ans plus tard, alors qu'elle a obtenu l'asile en Belgique, toute sa famille, dont un de ses enfants resté au pays, sera massacrée durant le génocide.
Dès que possible, au risque de perdre son droit d'asile fraîchement acquis, Marie Niyonteze retourne clandestinement au Rwanda. Elle ne pourra survivre sans avoir retrouvé les dépouilles de ses proches et leur avoir donné une sépulture selon la tradition. Ce retour, avec les souvenirs qu'il éveille, est au coeur du récit. Puis, accompli ce devoir impérieux, il faut reprendre pied : «Seule, en accord avec moi-même, j'ai donc décidé de vivre malgré tout, ma propre vie, afin de conserver votre mémoire, à vous qu'on a privés de vie.»
Ce récit bouleversant, bien qu'écrit dans une langue très sobre, sans l'ombre d'un pathos inutile, offre une leçon de courage et de dignité, mais aussi de lucidité, qui se refuse à étouffer sous une magnanimité feinte les souffrances et les révoltes.
"Ce n'est pas que je ne veuille pas pardonner, mais je ne trouve pas le pardon en moi (...) J'essaie seulement d'être sans haine."

Mon avis : Il y a des livres difficiles à chroniquer. Les raisons sont diverses et variées et propre à chaque individu. Au moment de rédiger cette chronique je me suis demandée quelle légitimité j’avais, qui j’étais pour essayer de parler de "Retour à Muganza".

Ce livre ce n’est pas un roman mais le témoignage d’une femme, Marie Niyonteze, qui a échappé de justesse à la mort mais qui a vu sa famille décimer. Pourquoi ? Tout simplement, car ils appartenaient à l’ethnie Tutsie.

A travers ses yeux, nous assistons impuissant à la montée de la haine jusqu’à son dénouement tragique : le génocide rwandais. Au fil des pages, elle survole les motifs et les rouages qui ont conduit à l’inimaginable, l’abject. Et pourtant, tous les signes avant-coureurs étaient là. N’avait-elle pas, elle-même, échappé de peu à la mort lors d’une première rafle.

Vivant dans la peur elle aura l’opportunité de pouvoir s’exiler et s’est dans son pays d’accueil, la Belgique, qu’elle apprendra la disparition de toute sa famille.

Commencera alors pour elle une véritable quête afin de pouvoir se reconstruire et retrouver la paix.

Il est inconcevable de ressortir indemne de ce genre de lecture. Toutefois, la manière très factuelle et pragmatique qu’à l’auteure de nous livrer son histoire nous la rend tolérable. On sent aussi à travers les lignes sa volonté de s’en sortir et le devoir de mémoire qui l’anime. Elle dit d’ailleurs que l’écriture de ce témoignage a été un exercice salvateur.

Ma note : D’habitude, je note l’ouvrage que je viens de chroniquer mais il est hors de question que je le fasse ici. Tout simplement, car pour moi cela serait un manque de respect. Ce livre ce doit d’exister et il serait incongru d’essayer de le noter. J’espère juste avoir respecté la parole de son auteure.

 

Je terminerai en reprenant deux passages du roman qui m’ont interpellé :

"Ce n’est pas que je ne veuille pas pardonner, mais je ne trouve pas le pardon en moi.

Il est inconfortable de rester otage du passé, mais vivre avec son bourreau est contre la nature humaine.

La normalisation des relations souillées par le sang, toute forme de pardon ou de réconciliation, trouvent en moi un obstacle invisible.

Y croire serait de la naïveté, le faire croire du cynisme.

J’essaie seulement d’être sans haine", p. 6

"Aujourd’hui, je suis parvenue à donner un sens à cette vie malgré votre absence. Mais il n’est pas d’instant où je ne pense à vous.

Je n’ai pas de haine, mais je ne pardonne pas.

Ma souffrance est indélébile, mais je l’assume, la transcende et la dépasse. Et je prie chaque jour qu’il n’y ait « plus jamais ça », comme on l’a tant de fois, et si vainement, crié de par le monde.", p. 94

 

Rédigé par Magali, le 01/11/2016

 

 

Pour finir, ce titre participe aux challenges suivant :

Petit bac 2016

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